Lettre du Cabinet d’Avocat – Décembre 2023 / Janvier 2024

Madame, Monsieur le Président,


Madame, Monsieur le Maire,

Ce début d’année est fructueuse pour le Cabinet, qui peut désormais compter sur la collaboration de Maître Aurore MIKOLIAN, qui vient fraîchement de prêter serment à la Cour d’appel de Metz et intègre le Cabinet en qualité de collaboratrice libérale.

Nous espérons que les fêtes ont été l’occasion d’un repos bien mérité pour vous et vos agents et nous vous souhaitons nos meilleurs vœux pour cette année 2024 qui débute, et une bonne lecture de la Lettre du Cabinet.

Loi industrie verte : quel impact pour les collectivités ?

L’essentiel :

La loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte loin de fixer des normes applicables aux acteurs économiques, vient en réalité principalement impliquer les collectivités. Le point sur les mesures phares.

 

La loi prévoit tout d’abord la mise en œuvre, dans le SRADDETT d’une planification du foncier industriel, à réaliser en même temps que la mise en compatbilité avec les objectifs de la zéro artificialisation nette (art. 1er).

 

Elle élargit ensuite (art. 15) les possibilité de compensation des impacts environnementaux des projets sous maîtrise d’ouvrage publics et privés en permettant de recourir non plus seulement à des « sites naturels de compensation » mais à des « sites naturels de restauration et de renaturation », permettant de compenser les atteintes de manière anticipée et/ou mutualisée (un porteur de projet étant éligible à « acquérir » des « unités de restauration » dans un projet de renaturation porté par un tiers); l’idée, à terme, est tout à la fois de faciliter le développement industriel tout en permettant aux collectivités de faciliter le financement de projets de génie écologique par des opérateurs économiques.
 
Le texte prévoit en outre (art. 17) d’ouvrir la procédure de déclaration de projet d’intérêt général, permettant une mise en comptabilité simplifiée des documents d’urbanisme, aux projets industriels vertueux, dont la substance reste à définir par décret en Conseil d’Etat.
 
Volet commande publique, outre des mesures d’aménagement qui relèvent du cavalier législatif (nouveau motif de non-allotissement pour les entités adjudicatrices [art. 26], possibilité pour les entités adjudicatrice de laisser les candidats présenter des offres variables en fonction du nombre de lots susceptibles d’être attribués [art. 28]), les mesures directement en lien avec l’objet de la loi sont les suivantes :
 

– Création d’un motif d’exclusion tenant à l’absence d’établissement du bilan des émissions de gaz à effet de serre pour les entreprises qui y  sont astreintes (art. 29)
– Création d’un motif d’exclusion pour les entreprises ne respectant pas leurs obligations en matière de publication d’information concernant la durabilité (art. 29)
– Création d’un motif de rejet des offres dans les marchés de fournitures ou de travaux intégrant une majorité de produits émanant de pays tiers mettant en œuvre une concurrence déloyale avec la France; à définir pas décret (art. 29).
– Obligation de prendre en compte des critères environnementaux pour les produits clés de la décarbonation (l’obligation de prise en compte du critère qui devait entrer en vigueur en 2026 pour l’ensemble des marché donnera lieu in fine à un cadencement par décret).

Loi énergies renouvelables : le point sur les zones d’accélération

L’essentiel :
La loi « énergies renouvelables » n° 2023-175 du 10 mars 2023 instaure des zones d’accélération pour l’implantation d’installations de production d’énergie renouvelable. Le point ci-dessous.

Issues d’un compromis entre l’Assemblée et le Sénat lors de la discussion du projet de loi « énergies renouvelables », les « zones d’accélération » sont un outil de planification permettant aux collectivités locales de définir les zones dans lesquelles la mise en œuvre d’installation de production d’ENR est préférée, et en contrepartie de mettre en œuvre des zones d’exclusion.

1. En vue de faciliter la définition de ces zones, l’Etat a mis en œuvre un outil cartographique en source libre (https://geoservices.ign.fr/portail-cartographique-enr) laissant apparaître le potentiel de production.

Les Communes, dans un premier temps, sont tenues à la mise en œuvre d’une procédure de concertation avec le public, selon des modalités qui sont laissées à leur discrétion.
Par la suite, et le cas échéant en concertation avec le gestionnaire des aires protégées, les Communes sont censées délibérer, à titre provisoire, sur les zones d’accélération à mettre en œuvre sur leur ban.

De même, les EPCI doivent tenir un débat, purement consultatif, sur la cohérence des zones d’accélération identifiées par les Communes.

Si la loi impose un délai de six mois aux communes et à l’EPCI pour délibérer à compter de la mise à disposition des données du portail, ce délai n’est pas assorti de sanction.

Les choix retenus par les Communes ont vocation à être collationnés par un référent préfectoral, chargé d’établir une cartographie et de la soumettre pour avis au comité régional de l’énergie et à une conférence territoriale réunissant les EPCI à fiscalités propres et les syndicat en charge de l’élaboration des SCOT.

In fine, au visa des différents avis rendus, qui sont simplement consultatifs, et à la condition que le volume de zones soit jugé suffisant par le Comité régional de l’énergie, les Communes doivent délibérer définitivement sur les zones retenues et peuvent à l’occasion mettre en œuvre des zones d’exclusion.


2. Cette définition a ensuite ou dans le même temps vocation à être intégrée dans les différents documents d’urbanisme.

C’est ainsi que la modification des plan locaux d’urbanisme pour y intégrer zones d’accélération et d’exclusion pourra se faire selon la procédure de la modification simplifiée.

De même, le recours à la modification simplifiée est permise aux mêmes fins pour intégrer les zones dans le document d’orientations et d’objectifs du SCOT.

3. Une fois les zones définies, elles produisent de effets somme tout assez maigres :
Les projets de production d’énergies renouvelables doivent voir leur autorisation environnementale instruite dans un délai réduit  de trois mois.

Le commissaire enquêteur désigné voit son délai pour déposer le rapport réduit de quinze jours

L’implantation de projets important en dehors des zones d’accélération est complexifié par la nécessité pour les maîtres d’ouvrages d’organiser un comité de projet à leurs frais.

Si l’installation en zone d’accélération est érigé en critère pour les appels à projets mis en œuvre par l’Etat pour la réalisation d’installation d’ENR, la mise en œuvre de ce critère ne peut conduire à exclure des installations situées en dehors des zones d’accélération.

Le texte est donc relativement timide mais s’inscrit, in fine, dans un contexte cohérent, ce dont la présentation de l’avant-projet de loi pour la souveraineté énergétique témoigne : il est ainsi prévu, notamment, d’abandonner les objectifs chiffrés de développement d’installations de production d’énergie renouvelable, le recentrage vers la notion d’énergies « décartonnées » et le choix durable de la poursuite du nucléaire.

Mésentente avec la hiérarchie : pas toujours une faute

L’essentiel :
La mésentente entre un agent est sa hiérarchie n’est pas toujours une faute dixit un récent arrêt de la Cour administrative d’appel de Marseille. Les limites de ce principe sont toutefois bien bornées.

Par un arrêt du 22 septembre 2023 (CAA de Marseille 22 septembre 2023, n° 22MA01598) rappelle que l’existence d’une mésentente professionnelle entre un agent et ses supérieurs hiérarchique n’est pas, en tant que tel, une faute disciplinaire.
 
Reste que l’arrêt lui-même pose deux limites :
 

– L’agent doit respecter son devoir d’obéissance hiérarchique. En d’autres termes, s’il lui est loisible de faire état de divergences d’opinion, il demeure tenu d’appliquer les directives données, sauf le cas où celles-ci sont manifestement illégales (art. L121-10 c. gén. Fonc. Pub.).

– L’agent doit s’abstenir de tout commentaire excessif qui violerait le respect dû au supérieur hiérarchique.

Par ailleurs, il convient de rappeler que ce principe trouve une limite pour les emplois fonctionnels. Dans ce cas de figure, et cela s’explique par la nature particulière des emploi en cause, la démonstration d’une mésentente durable peut justifier l’existence d’une perte de confiance de nature à fonder une décharge fonctionnelle. (par exemple CAA de Paris, 1er mars 2018, n° 17PA02808)

Emplacement réservé : un projet tendant à la réalisation
de l’ouvrage défini ou rien !

L’essentiel :
Le Conseil d’Etat vient préciser le degré de contrôle sur les demandes d’urbanisme déposées sur l’assiette d’emplacements réservés par la PLU.

Les emplacements réservés, qui peuvent être définis par le plan local d’urbanisme en vue de la mise en œuvre à moyen terme d’un ouvrage public ou d’intérêt général, conduisent à limiter les droits à construire du propriétaire.

Traditionnellement, cette limitation des droits à construire faisait simplement obstacle à la mise en œuvre d’ouvrage ayant pour effet de faire échec à la mise en œuvre du projet défini par la collectivité (CE 14 octobre 1991, n° 92532).

Ainsi, une construction temporaire demeurait admissible, celle-ci ne portant pas atteinte à la destination finale de l’emplacement (CE 16 mai 2011, n° 324967).
Par un arrêt de juillet dernier (CE 19 juillet 2023, n° 456409), le Conseil d’Etat semble aller un peu plus loin.

Ainsi, celui-ci sanctionne purement et simplement l’octroi d’un permis de construire  ayant pour objet la construction de bâtiments sur un emplacement réservé, quoique le projet ne fasse pas obstacle, à l’avenir, à la construction de la voie de circulation en vue de laquelle l’emplacement réservé a été défini.

Il relève en effet que le permis ne visait pas à construire la voie de circulation en cause.

Le Conseil d’Etat réaffirme toutefois, à titre de tempérament, que le projet peut être accepté s’il a un objet mixte : réaliser l’ouvrage d’intérêt général défini et lui adjoindre un autre ouvrage.

En d’autres termes, il faut désormais considérer que les seuls projets admissibles sur un emplacement réservé sont ceux qui ont, au moins partiellement, pour objet de mener le projet défini par la collectivité au sein du PLU.

Publication conçue et réalisée par la SCP IOCHUM GUISO, Société civile profession- nelle d’Avocats—2, Place Raymond Mondon—57000 METZ.

Directeur de Publication ; Maître Vincent GUISO

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